Jeudi 17 janvier 2013
NOS ÉCRITS
Après ces fêtes, copieuses à tout
point de vue et notamment en spectacles, nous voici à la diète. Mais pas tout à
fait, Il Teatro continue d’écrire (la suite de Damien pour tout vous
dire…), et de travailler, lentement mais sûrement sur la pièce Diktat de
Cormann. Les « choses »
avancent…
Pour entamer la nouvelle année,
que je vous souhaite, à toutes et à tous, belle, digne de vous, et digne de vos
aspirations, Il Teatro vous propose la suite du Fils du Boucher, nous en sommes au sixième épisode.
Le début est ici. Bonne lecture,
n’hésitez pas à partager vos avis, vos impressions, bonnes ou mauvaises sur
cette lecture. Il Teatro, pour ceux de passage et qui nous découvrent, vous
propose des critiques de spectacles, des pièces écrites par nos modestes soins,
des analyses de textes de pièces lues, des synthèses sur des auteurs ou
metteurs en scène, enfin, des interviews de comédiens professionnels ou
metteurs en scène, passionnés par leur métier...
Il lui met un mouchoir dans la
bouche pour l’empêcher de parler, puis la bâillonne.
L‘homme : Bien.
A présent, tu te retournes et tu ne bouges plus.
Elle est dos à lui. Il prend une
chaise, la fait asseoir puis lui attache les pieds à la chaise ainsi que la
main gauche. Il approche une petite table, met du papier dessus, un stylo.
L’homme : Tu
écris bien j’espère. Ce sera mieux ainsi. Plus crédible.
Un temps. Pendant ce temps, l’homme
la fixe, sans bouger. Elizabeth respire de plus en plus fort, ne comprend pas
ce qui lui arrive, ou plutôt si. Elle comprend sans doute que sa dernière heure
est arrivée.
L’homme : Je
t’explique ce qui va se passer. Je vais te frapper un peu au début. Tu verras
ainsi que je n’ai pas peur de toi. Tu verras aussi que ça ne me dérange pas de
frapper une femme. Tu verras encore que
certains coups font mal, d’autres non. Mais surtout, tu comprendras que c’est
moi qui dose, et qui décide si un coup fait mal ou non. Ne t’inquiète pas, je
te l’annoncerai avant. Ensuite, tu vas répondre à mes questions par écrit.
Toutes. Car tu sauras que je dis la vérité quand je t’annonce un coup qui
fait mal, ou très mal, ou qui te défigurera... A la fin, quand tu auras répondu
et que je saurai tout, je t’autoriserai à rédiger une lettre pour la police,
une pour tes proches aussi. Qu’ils ne s’inquiètent pas de ta disparition, ou
qu’ils la comprennent. Ce sera ton choix. Si tout va bien, dans une heure c’est
fini. Et tu vas mourir sans souffrances. Si tu résistes, on y passe la nuit, et
tu meurs à petit feu dans des souffrances que tu n’as jamais vécues, que tu ne
pensais pas possibles. Le corps est étonnant. Commençons.
Il se lève, pousse la table.
L’homme :
Celle-ci va te surprendre mais ne fait pas mal. Il lui file une gifle magistrale.
A présent, une qui fait
mal... Il la gifle de nouveau et Elizabeth gémit sous le coup.
Une dernière plus appuyée…
Il décoche une gifle avec beaucoup d’élan et
Elizabeth bascule sur le côté sous la violence du coup. Elle gémit de nouveau.
La chute a fait du bruit.
Melikian, de
derrière la porte : Elizabeth ? Tout va bien ?
Elizabeth gémit le plus fort
qu’elle peut.
Melikian :
C’est vous Elizabeth ? Répondez-moi ?
Elle gémit de nouveau. L’homme
masqué a sorti son pistolet et n’a pas eu le temps de la faire taire. Il s’est
approché de la porte pour regarder dans le judas.
Melikian, frappant
à la porte : Elizabeth, ouvrez-moi !
Elizabeth gémit le plus fort
qu’elle peut, toujours par terre.
Melikian, frappant de plus en plus fort :
C’est vous que j’entends Elizabeth ? Vous êtes tombée ? Je vous
préviens, si vous n’ouvrez pas dans l’instant j’enfonce la porte…
L’homme masqué décide de s’enfuir par la fenêtre. La situation semble
trop compliquée à rétablir. Elizabeth gémit une dernière fois avant que
Melikian n’enfonce la porte.
Melikian, rentrant arme à la main, et se précipitant
vers Elizabeth : Elizabeth !
Après s’être assuré que l’appartement est vide, il la libère.
Elizabeth : Ha !
Ca fait un mal de chien ce truc…
Melikian : Relevez
vous pour voir si vous n’avez rien de cassé.
Elizabeth : Si, la
mâchoire je crois…
Melikian : Si
c’était le cas, je ne vous entendrais pas vous plaindre, vous seriez en train
de gémir en la tenant dans vos mains…
Elizabeth : Je sais
quand même où j’ai mal, putain ! Lâchez-moi ! Le nez aussi, il m’a cassé
le nez…
Melikian : Il saigne
un peu c’est vrai…
Elizabeth : Un
peu ? Un peu ? Un psychopathe m’agresse, et vous me dites que j’ai un
peu mal ? J’ai vachement mal partout, il m’a torturée à mort !
Melikian : Si
c’était le cas, vous ne seriez pas debout…
Elizabeth : Je vous
emmerde vous, c’est compris ?
Melikian : Je
n’attendais pas des fleurs spécialement, mais de là à m’
« emmerder », je vous demanderais de vous calmer un peu, je crois que
si je n’étais pas entré…
Elizabeth : Quoi si
vous n’étiez pas entré ? Quoi ? Je serai en train de crever, c’est ça
que vous voulez me dire ? Vous voulez passer pour le héros de la soirée
c’est ça ? Vous m’espionniez et vous aimeriez que je vous remercie de
votre initiative ? Vous m’avez sauvée des saloperies d’un homme mais vous
êtes un homme aussi, comme l’autre salaud… Je vous hais, je vous hais tous…
Elle tombe à genoux et se met à
sangloter. Il s’approche, s’agenouille aussi et veut la prendre dans ses bras.
Elle refuse au début, et le frappe, le repousse. Il l’empêche de continuer à le
frapper, lui bloque les mains et l’enlace par derrière. Elle s’abandonne, se
retourne et se laisse finalement prendre dans ses bras.
Noir.
Scène 4
Quelques heures plus tard dans la
nuit. Elizabeth s’est assoupie dans les bras de Melikian sur le canapé.
Elizabeth : Il est
quelle heure ?
Melikian : Trois
heures.
Elizabeth : Du
matin ?
Melikian : Oui du
matin.
Elizabeth : Je
devrais être morte… Je suppose que je dois vous remercier…
Melikian : Ecoutez,
je crois plutôt qu’il faut vous reposer.
Elizabeth : Je
ferais mieux d’appeler la police…
Elle se dirige vers son téléphone
et le ramène en composant le numéro.
Melikian : Je dois
vous informer d’une chose ou deux auparavant. Ensuite, vous verrez ce que vous
faites…
Elizabeth le regarde, comme par
défi, et met le téléphone à son oreille.
Melikian : Vous me
devez bien ça, non ? Je ne demande pas grand-chose…
Elizabeth, raccrochant
alors qu’on entend « Allô ?» au bout du fil : La
dernière fois que j’ai fait ça, les emmerdements me sont tombés dessus… je ne
sais pas pourquoi, je recommence…
Melikian : Comme je
vous le disais derrière la porte en début de soirée, c’est moi qui ai prévenu
la police de cette disparition problématique…
Elizabeth : Trop
gros poisson pour vous, c’est ça ?
Melikian : Disons,
que la famille en question n’est pas des plus chaleureuses…
Elizabeth : La
mafia ?
Melikian : La
pieuvre oui.
Elizabeth : Et vous
ne le saviez pas avant d’entamer l’enquête sur Bernardski ?
Melikian : Je ne
suis pas d’ici. Et puis, j’étais à des lieux de penser que la mafia ferait
appelle à un privé pour enquêter sur ses propres affaires.
Elizabeth : Vous en
concluez quoi ?
Melikian : Ils se
sont servis de moi pour obtenir des informations en toute discrétion sans
éveiller de soupçons. Ils avaient prévu d’effacer les traces ensuite. Mais, je
suis un emmerdeur, vous l’avez remarqué vous-même…
Elizabeth : Je ne
pensais pas ce que je disais tout à l’heure.
Melikian : Vous
n’avez pas à vous justifier…
Elizabeth :
Qu’est-ce qui se passe, alors ?
Melikian : Le ménage
commence. Ils ne veulent pas que la disparition de Bernardski fasse du bruit,
c’est mauvais pour les affaires. Ils viennent d’apaiser des tensions anciennes,
ils veulent le calme à tout prix, et surtout pas de flics sur leurs
plates-bandes. Ils s’occupent de vous, et on n’en parle plus. Ils voulaient
s’assurer qu’il était bien mort, je pense, en vous interrogeant avant de vous
tuer. On ne sait jamais, le privé aurait pu se tromper… En tout cas,
maintenant, ils savent que je vous ai aidée, et que j’ai balancé, c’est à peu
près certain. Ils ont du voir les flics débarquer chez vous. Ils vous
surveillent. Je suis au courant, vous êtes au courant, et les flics commencent
à être au courant… Et la famille le sait…
Elizabeth : Si je me
mets sous la protection de la police c’est mieux, non ?
Melikian : Comment
vous justifiez qu’ils vous protègent ?
Elizabeth : Ils ont
essayé de me tuer, ça ne suffit pas, ça ?
Melikian : Ils
comprendront surtout que l’enquête est finie…
Elizabeth : Je ne
comprends pas.
Melikian : Comment
vous justifiez que la mafia a essayé de vous tuer ?
Elizabeth : J’en
sais rien, je m’en fous…
Melikian : La mafia
fait le ménage quand il y a besoin. Un chef de son clan est mort ? On
venge sa mort. Pourquoi tuer une honnête citoyenne si ça n’en vaut pas la
peine ? S’ils cherchent à vous tuer, c’est parce que la mafia est sûre que
vous l’avez tué ce Bernardski. La police le sait, vous mettra en garde-à-vue,
et vous avouerai, vous craquerai. Double avantage pour eux : vous êtes
protégée de fait puisque vous êtes dans les locaux de la police pendant 48
heures. Et, en plus, ils bouclent l’enquête : vous avouez le meurtre. Vous
ne pensiez pas qu’ils investiraient dans une garde rapprochée à domicile ?
Elizabeth : Ecoutez,
au point où j’en suis, je me fiche de tout cela. Vire en prison, mais vivre,
c’est mieux que mourir à domicile, non ?
Melikian : Je ne
vous donne pas trois jours en prison… La pieuvre est partout…
Elizabeth : Alors,
je fais quoi ?
Melikian : J’ai
peut-être une sortie. Mais j’ai besoin de deux choses de votre part. Votre
confiance, et un peu de patience. J’ai besoin d’une journée pour m’assurer de
ce que je crois.
Elizabeth : J’ai
largement le temps de mourir…
Melikian : Sauf si
la police vous protège.
Elizabeth : Vous
venez de me dire que ce n’était pas une bonne idée...
Melikian : Sauf si
vous avez quelque chose à négocier, à échanger…
Un temps.
Elizabeth : Pourquoi
je vous ferai confiance ?
Melikian : Parce que
j’ai ce quelque chose à négocier pour vous.
Elizabeth : Et quoi,
s’il vous plait, qu’on en finisse ?
Melikian :
Kassabian.
Elizabeth : Kassa quoi ?... Vous voulez dire,
le chef du milieu ?
Melikian : Mais,
sans vous, je ne peux rien…
Elizabeth : Vous
pouvez le livrer à la police, c’est ça ?
Melikian : Disons,
que ce n’est peut-être pas impossible…
Elizabeth, après un long temps de réflexion que
Melikian lui laisse : Pourquoi vous faites cela pour moi ?
Melikian : Nous
sommes dans le même bateau…
Elizabeth : Non,
non, ça ne me suffit pas ça, comme réponse. Vous êtes suffisamment malin pour
fuir la mafia sans moi, non ?
Melikian : Alors,
l’orgueil peut-être, de pouvoir coffrer le caïd…
Elizabeth :
Vraiment ?
Melikian : Je ne
sais pas…
Elizabeth :
Alors ?
Melikian : Et vous,
qu’en pensez-vous ?
Elizabeth : Trop
facile monsieur l’inspecteur, vous bottez en touche…
Melikian, riant : Vous avez raison, j’esquive…
Elizabeth : Moi, je
crois que vous êtes un raté, je veux dire un flic raté… on vous a viré
peut-être, ou on ne vous a jamais pris… une connerie, ou une incompétence, ou
les deux… et vous en crevez, car vous êtes comme eux…
Melikian, souriant vaguement : Touché… votre
ami François vous appelle Lise, c’est
bien ça ?
Elizabeth : Et
alors ?
Melikian : Puis-je
vous appeler Lise ?
Elizabeth : Allez
vous faire foutre. Finalement, j’appelle les flics ?
Melikian : Je
préfère le faire moi-même. Vous permettez ?
Melikian compose le numéro. Ca sonne. On entend,
« Allô ? ». Melikian la regarde, elle sort de la pièce en
direction de sa chambre, puis, seul, il parle …
Melikian :
Passez-moi le lieutenant en charge de l’affaire Bernardski s’il vous plaît… Ah,
oui, j’oubliais l’heure… Ecoutez, l’affaire est très grave, dérangez-le chez
lui… qui je suis ? Vous ne me
reconnaissez donc pas mademoiselle ? ... Je suis Melikian… oui, j’attends…
oui sur ce numéro…
Il raccroche et attend. Noir.
Scène 5
Le lendemain soir. Elizabeth et
François sont dans le salon d’Elizabeth. Elle est sur son canapé, lui dans un
fauteuil.
Elizabeth : La
police va certainement m’inculper d’homicide. Elle est revenue ce matin…
François : Mais ils
n’ont rien… que des présomptions.
Elizabeth : Ils ont
fouillé, fait des prélèvements, relevé je crois des empreintes... Ils ont
décidé de creuser. Tu avais raison…
François : Ecoute,
je vais leur dire que nous avons passé la soirée ensemble après que Bernardski
soit parti. Tu avais besoin d’être réconfortée, je serai ton alibi. Monsieur
Albert peut confirmer, il nous a vus, et nous a parlés.
Elizabeth : Tu sais,
la police m’a laissée entendre que ce n’était pas un petit truand, peut-être un
chef de clan…
François :
Crois-moi, ils se trompent. Je sais de source sûre, que c’était une petite
crapule, une petite frappe…
Elizabeth : Quelle
importance maintenant ? … Il vaut mieux qu’on arrête le jeu François,
non ?
François : Non, ils
vont te charger encore plus s’ils découvrent tout ça. Cela veut dire que tu as
caché sciemment des éléments pour bloquer l’enquête. Il faut aller au bout de
l’histoire. On va s’en sortir libres, et définitivement tranquilles. Fais-moi
confiance.
Elizabeth : Tu n’as
pas peur qu’ils découvrent des traces, des indices dans la cuisine ?
François : Ne
t’inquiète pas, j’ai bien travaillé.
Elizabeth : Tu me
parlais pourtant de toutes ces techniques modernes capables de détecter des
choses invisibles…
François : Ne t’en
fais pas, ne t’en fais pas. Si je témoigne pour toi, tout ira bien…
Elizabeth : Je n’ai
plus envie d’argumenter. Fais comme bon te semble. Je suis fatiguée François,
si fatiguée de tout ça…
François :
Repose-toi. Endors-toi. Je suis là, je veille. Tu en as besoin. Je suis le seul
à pouvoir te protéger si bien. Dors. Je reste auprès de toi toute la soirée,
jusqu’à ce que la police revienne, si elle revient...
Elizabeth s’allonge sur le canapé, pose sa tête sur les genoux de
François.
Noir.
ACTE III
Scène 1
Le même soir.
François, s’est assoupi, mais
Elizabeth, elle, ne dort pas. La police arrive, frappe à la porte.
Le lieutenant :
Police ! Ouvrez ! … Madame, Artaud, ouvrez s’il vous plait, nous
avons des questions à vous poser…
François se réveille, se frotte
un peu les yeux et s’étire.
Elizabeth, se levant : Oui, oui…
Le lieutenant : Mademoiselle
Artaud ?
Elizabeth : Oui,
voilà…
Elle ouvre, le lieutenant entre.
Le lieutenant, découvrant
François : Vous êtes ici aussi, vous ? Ca tombe bien, j’ai
quelques questions à vous poser aussi…
Elizabeth : Qu’est-ce
que vous voulez ?
Le lieutenant : Des
réponses, voilà ce que je veux… suivant les vôtres, j’aviserai de la suite à
donner à cette enquête… Je vous informe qu’une commission rogatoire m’autorise
cet interrogatoire, ainsi qu’une perquisition complémentaire de votre domicile…
François : Vous
n’avez pas le droit de perquisitionner…
Le lieutenant :
Madame m’a laissé entrer… de toute façon, nous n’en sommes plus là… en
attendant mes assistants et la scientifique, commençons voulez-vous ? Et
puisque monsieur a pris la parole, je
commence par vous : que faisiez-vous dans la nuit du 4 au 5 mai entre 19
heures et minuit ?
François : Vous le
savez très bien…
Le lieutenant : Je
vous écoute…
François : Je
consolais Elizabeth qui venait de se faire plaquer par son cher et tendre…
Le lieutenant :
Avez-vous vu ce jeune homme sortir, l’avez-vous croisé, étiez-vous déjà dans
l’appartement quand c’est arrivé ?
François : Je l’ai
aperçu, il s’en allait effectivement…
Le lieutenant :
Pourquoi l’avez-vous aperçu ?
François : Parce
qu’il partait, je viens de vous le dire…
Le lieutenant : Vous
me comprenez très bien : que faisiez-vous sur le palier ? Vous aviez
prévu cette séparation ?
François :
Evidemment, non…
Le lieutenant :
Alors ?
François : J’ai
entendu du bruit peu avant. Je suis le voisin juste au dessus d’Elizabeth.
Normalement, on n’entend rien, sauf si le bruit est très fort. Donc, j’en ai
conclu qu’il y avait un gros problème sans doute…
Le lieutenant : Quel
genre de bruit ?
François : Un meuble
renversé, quelque chose qui se casse…
Le lieutenant : Un
bruit sourd ?
François : Si vous
voulez…
Le lieutenant :
Comme un corps qui tombe…
François : Comme un
objet qui se casse…
Un temps.
Le lieutenant : Vous
aimez bien votre amie monsieur.., monsieur comment déjà ?
François : Ménard.
Le lieutenant : Oui,
c’est bien ça. C’est votre nom d’origine Ménard,
monsieur Ménard ?
François : Que
voulez-vous dire ?
Le lieutenant : Vos
parents sont arméniens, je crois ?
François : En effet,
et alors ?
Le lieutenant :
Alors, rien… simple curiosité… vous avez le droit de changer de nom c’est vrai…
belle intégration à la française d’ailleurs, une belle carrière de journaliste
qui casse du policier dès que c’est possible… oh, vous savez, je m’en fous…
vous êtes resté jusqu’à minuit exactement ?
François : A peu
près, peut-être minuit et demi…
Le lieutenant :
Peut-être… ?
François : Ce n’est
pas facile à dire précisément, je n’ai pas regardé ma montre en sortant,
j’étais inquiet pour Elizabeth.
Le lieutenant :
Minuit, une heure, deux heures, … pour vous, un détail, pour moi, ça change
tout… on peut en faire des choses en une heure, une demi-heure même… Vous ne
chercheriez pas à couvrir madame Artaud par hasard ?
François : Enfin,
non, voyons… la couvrir de quoi ? Je me rappelle maintenant, il devait
être une heure du matin quand je me suis couché. Je me rappelle avoir réglé mon
réveil, et il était une heure.
J’ai dû la quitter peu
avant, vers moins le quart.
Le lieutenant : Mmhmm…
François : Vous avez
trouvé un corps, vous avez des preuves de son décès ?
Le lieutenant : Ah,
le journaliste revient en force, on ne se refait pas n’est-ce pas ? Si un
scoop se profilait… sauf qu’à titre de témoin, à défaut d’autre chose pour le
moment, je vous demande de garder le silence sur toute cette affaire, et de
rester à la disposition de la police, ne pas quitter la ville… suis-je bien
clair, monsieur Ménard ?
François : Tout à
fait…
Le lieutenant : Vous
pouvez disposer maintenant monsieur Ménard.
François : C’est
que…
Le lieutenant : Vous
pourrez voir votre amie ensuite, si c’est ce qui vous inquiète… à moins qu’elle
n’avoue des choses que vous couvririez… au revoir, monsieur Ménard. La suite se
passera de vous.
François sort. Un temps.
Scène 2
Elizabeth : Vos
assistants ne sont toujours pas venus ?
Le lieutenant : Ce
n’est pas nécessaire… Ils ont déjà fait leur travail et plus encore…
Elizabeth :
Ah ?
Le lieutenant :
Venons-en à notre affaire… Melikian ne vous a rien dit, pas vrai ?
Elizabeth : Il m’a
parlé d’une solution, pour me sortir de là, d’un lien avec un certain
Kassabian, dont vous m’aviez déjà parlé…
Le lieutenant : Vous
l’avez tué, n’est-ce pas ? Bernardski ?
Elizabeth, baissant
la tête et après un temps : Oui… mais, j’ai tout fait toute seule,
le corps a été…
Le lieutenant, la
coupant : Allons, allons, épargnez-nous tout ce cirque auquel vous
ne croyez pas vous-même. Votre ami François a bien travaillé, mais, la science d’aujourd’hui
remplace les intuitions des meilleurs flics. Le corps reste introuvable, mais
on a découvert des traces de son sang dans la cuisine, et ce, malgré les
nombreux produits employés. On connaissait déjà son ADN, le recoupement a été
rapide… Et puis, notre bon François s’est un peu trompé sur son heure de
coucher, non ? Il faisait jour pourtant quand il est allé dormir …
difficile de confondre 6h00 du matin, avec une heure du matin normalement,
non ? C’est monsieur Albert, qui dit ça… Monsieur Albert dit aussi qu’il a
observé toutes les allées venues du monsieur
du deuxième… Il l’a vu avec un tapis enroulé, bien lourd, sur le dos et en
compagnie d’un autre homme qui l’a débarrassé du paquet… vers les 4 heures du
matin… un homme inconnu de monsieur Albert…
Elizabeth : C’est
moi la coupable, il n’a fait que m’aider, il a voulu me protéger ; de
toute façon, l’autre était mort…
Le lieutenant : Oui,
mais ça porte un nom : complicité d’homicide…
Elizabeth : Je sais…
je lui avais promis de ne pas le dénoncer, je suis nulle…
Le lieutenant : vous
l’aimez ?
Elizabeth : Je
l’aime bien, oui…
Le lieutenant : Ce
n’est pas une réponse ça.
Elizabeth : Non, je
ne l’aime pas…
Le lieutenant : Et
lui, il vous aime ?
Elizabeth : Je
crois, oui. Pourquoi ne suis-je pas déjà arrêtée, et lui avec moi, puisque vous
savez tout ? Vous n’avez même pas besoin de nos aveux… vous l’avez même
laissé repartir… que dois-je comprendre ?
Le lieutenant : Nous
y voilà. Melikian a tout balancé, à moi en l’occurrence, quand il s’est aperçu
qu’il avait été embauché par la mafia. Mais, juste avant, il a remonté ses
commanditaires… au plus haut… au sommet quoi…
Elizabeth :
Kassabian ?
Le lieutenant :
Lui-même. Or, vous venez de tuer son principal lieutenant. Alors, Kassabian cherche
à comprendre… Il vous trouve… et il comprend effectivement la situation, et il
se trouve que ça l’arrange bien, le Kassabian…
Elizabeth : Je ne
comprends pas… et Melikian là-dedans ?
Le lieutenant : Il
flaire le gros coup ! Il peut le faire tomber grâce à cette situation…
Elizabeth : Et moi
dans tout ça ?
Le lieutenant :
Vous ? Vous n’avez pas trop le choix, vous devez nous aider… C’est vous la
clé… C’est vous qui le ferez tomber…
Noir.
à suivre ...
Épisode 3
Épisode 4
Épisode 5
Pour lire le teaser de la pièce et le début dans la foulée, c'est par ici !
L'épisode 2Épisode 3
Épisode 4
Épisode 5
Désolée de cette longue absence, je rattrape aujourd'hui mon retard ! J'aime beaucoup le retournement de situation, cette idée que Lise est dépassée par tous les événements, et puis ce mélange d'intrigues dont vous nous avez déjà prouvé votre maîtrise dans Damien le Nouveau !
RépondreSupprimerBonsoir Minyu. Je salue votre retour. Sans vous, ma modération est au chômage technique... En effet, les choses s'accélèrent, se compliquent. Encore deux ou trois publications pour en finir avec Lise. Façon de parler... Non, je ne dévoile rien. Le début fut peut-être un peu lent, j'espère que le rythme devient plus prenant. Vous m'en direz des nouvelles à la fin.
SupprimerNe travaillez pas trop d'ici là, ou alors avec passion et sans modération. S'il y a un "juste milieu", c'est alors que des contingences médiocres vous emprisonnent. Ensuite elles vous suivent longtemps. Une vie entière parfois. Le théâtre vous attendra, il n'est pas rancunier, votre blog aussi mais, cela en vaut-il la peine ? Si, par contre, c'est le théâtre, déjà, qui vous accapare assidument, je salue plus bas encore, et encore.